Bien que Géricault puise les sujets de ses tableaux dans les faits contemporains, sa peinture est de facture classique et sa représentation réaliste. Son œuvre trahit son admiration pour Rubens, on y décèle également une influence notable de Michel-Ange et du Caravage.
Le tableau de La Méduse
1817-1818
Huile sur toile 491 x 716 cm
A l’automne 1817, Géricault revient à Paris après avoir passé à peine un an en Italie –le traditionnel et classique voyage de perfectionnement des artistes à cette époque –. Quelques mois que Géricault estime lui-même suffisant. En réaction au romantisme littéraire, il qualifie d’ailleurs celui-ci de simple sensibilité qu’excitent seulement les vents, les orages et les clairs de lune.
Le scandale de naufrage de la Méduse près des côtes du Sénégal lui a offert un sujet d’actualité unique :
Sur 147 rescapés, 10 ont survécu, tous des officiels sauf ce noir agitant un tissu rouge, du nom de Jean-Claude qui faisait partie du peuple. Pendant 13 jours, leur odyssée sanglante sur un radeau fut le cadre de règlements de compte et de scènes de cannibalisme.
Le peintre choisit de représenter un faux espoir, y ajoutant encore plus de tragédie : le bateau parti à leur secours apparaît à l’horizon mais s’éloigne sans les voir. Le sauvetage des naufragés est censé être ultérieur à cette scène.
Parmi les agonisants, un Noir agite un linge blanc, allusion probable à la Traite qui était officiellement abolie. Géricault y donne une vision synthétique de l’existence humaine abandonnée à elle-même. Et pour l’anecdote, le peintre fit poser certains de ses amis, ainsi Eugène Delacroix y est représenté de dos, c’est l’homme couché à plat ventre au premier plan.
Le gouvernement de l’époque tente de camoufler la tragédie et l’opposition la dévoile. Sous la pression de l’opinion publique, le ministre et ses officiers de marine sont limogés. La tragédie s’est produite en 1816.
En 1814, Louis XVIII monte sur le trône suite aux défaites de Napoléon en Russie et à Leipzig. Le roi veut démontrer sa légitimité par la stabilité politique et par prospérité sociale. C’est une époque où les artistes rendent hommage au régime, à la nation et à l’Eglise par de grands tableaux historiques, des scènes de saints et par des œuvres qui célèbrent la monarchie et soulignent les victoires du passé de l’empereur.
Géricault prend soin de présenter son œuvre sous un titre anodin, Scène d’un naufrage. Serait-ce pour ne pas susciter de remous ? Puisque le Salon a un double rôle, artistique et politique.
Lorsque cette immense toile de Géricault a été présentée au Salon, le jeune peintre de 27 ans n’a qu’un seul objectif : devenir célèbre. Le tableau n’a été ni acheté par Louis XVIII, ni accepté et jugé esthétique pour la critique.
Si le tableau de Géricault représente une allégorie à la souffrance humaine, l’image du tableau demeure avant tout un symbole d’espoir plutôt qu’un pénible et atroce naufrage. Il y a eu sur le Radeau l’abus de pouvoir, la rébellion, la mutinerie.
Le radeau de la Méduse est son œuvre testamentaire et aussi la dernière œuvre achevée où ses références classiques supplantent finalement son obsession du modernisme. Le tableau, de très grand format, nécessite deux ans de travail. Il est réalisé dans un atelier près de l’hôpital Beaujon. Cette proximité lui permet d’effectuer des études sur les cadavres et les malades, ce qui confère un réalisme saisissant à l’état effroyable des survivants du Radeau. même si l’état du corps humain après treize jours sans nourriture pouvait être bien différent.
L’accueil réservé par le public au Radeau, l’un des trois tableaux ayant été exposés du vivant du peintre, fut à la fois fort discret et critique face à l’intention de Géricault et à sa pratique artistique du traitement du corps humain.
Le Radeau de la Méduse est à la fois le tableau le plus célèbre de Géricault (1791 – 1824) et un véritable manifeste du Romantisme. C’est également une œuvre empreinte de scandale.
Géricault, dans sa trop brève carrière, exécuta de nombreux portraits, des études de chevaux (sa grande passion), et des scènes de guerre restées parmi les plus célèbres de ses tableaux :
« L’Officier de chasseurs à cheval de la garde impériale chargeant », « Cuirassier blessé quittant le feu ».
Cet artiste eut son atelier rue des Martyrs, dans le quartier de la Nouvelle-Athènes, si cher aux artistes romantiques. Il loua un 2e atelier dans le quartier du Roule où il exécuta le Radeau de la Méduse. Il meurt tragiquement à l’âge de 33 ans, des suites d’une tumeur survenue après une chute de cheval. Sa tombe au Père-Lachaise, réalisée par Etex, est d’une grande beauté : le peintre est allongé sur sa tombe, tenant sa palette à la main, prêt à se relever pour se remettre à la tâche.
Pour découvrir cette œuvre dans le musée : Aile Denon, 1er étage, Mollien, salle 77.
Sources : www.louvre.fr, "Dictionnaire amoureux du Louvre" de Pierre Rosenberg.
Musée du Louvre rue de Rivoli
Métro Palais Royal – Louvre

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