mercredi 2 novembre 2011

Noël Le 25 Décembre, Un Choix Stratégique ?

Un fait est aujourd'hui bien établi : la fête de Noël célébrée le 25 décembre a été ignorée des chrétiens des trois premiers siècles. " Ce qui allait en effet constituerune date centrale pour l'Eglise chrétienne ne souciait pas du tout les premiers fidèles pour la simple raison que la naissance du Christ n'était pas mentionnée... Beaucoup plus que l'incarnation, sa mort et sa résurrection intéressaient ces premières communautés ", note le théologien Oscar Cullmann. Ces premiers chrétiens ne célébraient d'ailleurs pas davantage la naissance des apôtres ou des martyrs, et Origène attire l'attention sur le fait que, dans la Bible, seuls les impies tels Pharaon et Hérode ont fêté le jour de leur naissance.
Les deux seuls évangélistes qui évoquent cette naissance, saint Luc et saint Matthieu, n'ont cependant jamais donné d'indication calendaire et, lorsque les Pères de l'Eglise voulurent lui attribuer une date précise, leurs savants calculs n'aboutirent pas au même résultat. On trouve ainsi dans un comput pascal datant de l'an 243 que le jour de naissance aurait été d'abord fixé au 28 mars - cette date correspondant à une période où jour et nuit ont la même longueur -, car il est dit dans la Genèse que Dieu, lors de la Création, sépara la lumière des ténèbres. Aux trois premiers siècles, la date est située au printemps. La présence des bergers, non loin de la crèche mentionnée par Luc, ferait en effet songer que cette naissance survint plutôt en mars à l'époque plus clémente de l'agnelage.
Au IIe siècle, une première mention de la fête se trouve chez Clément d'Alexandrie qui, évoquant les disciples du gnostique Basilide, nous apprend que ceux-ci fêtaient le 6 ou le 10 janvier le baptême du Christ, considéré comme la première " apparition " ou " manifestation " (du grec epiphaneia) divine. Dès la première moitié du ive siècle, cependant, la fête de l'Epiphanie réunit à la fois le baptême et la naissance du Christ.
Un papyrus daté du IVe siècle découvert en Egypte contient la plus ancienne liturgie de Noël, célébrée alors dans la nuit du 5 au 6 janvier. Une autre description, due à Ephrem, Père de l'Eglise qui vécut également au ive siècle, nous est parvenue de Syrie. L'auteur fait mention dans cet extraordinaire document " des maisons ornées de couronnes ", il décrit la joie des enfants et l'allégresse des adultes. La nuit est tout particulièrement évoquée : " Voici la nuit, la Nuit qui donna la paix à l'Univers "... " Qui pourrait dormir en cette nuit où veille l'univers entier ? " Etaient alors fêtées la naissance, l'adoration des bergers et l'apparition de l'étoile. Le jour suivant était consacré à l'adoration des Mages et au baptême du Christ dans les eaux du Jourdain. Un troisième document a été conservé où l'on découvre la pèlerine Egérie relatant à son tour cette fête lors de son séjour en Palestine. Elle raconte comment, dans la nuit du 5 au 6 janvier, tous se rendaient avec l'évêque en un cortège solennel à Bethléem pour y célébrer un culte nocturne dans la grotte qui était censée être celle où Jésus naquit. A l'aube du 6 janvier tout le cortège arrivait à Jérusalem à l'église de la Résurrection dont l'intérieur était illuminé de " milliers de bougies ".
Le symbole de la lumière est ici encore omniprésent. Mais cette " réunion de deux événements, naissance et baptême, sous un thème commun devint peu à peu difficile à concevoir d'un point de vue théologique ", dit Cullmann, et la nécessité de choisir une date s'imposa. La fixation au 25 décembre s'est faite à Rome sans doute en 336, à la fin du règne de Constantin. Ce choix semble avoir été hautement tactique.


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