Pour comprendre la situation actuelle
Petite histoire des obédiences
L’histoire des associations ouvrières initiatiques commence en Europe occidentale vers 790, lorsque des maçons romains débarquent en Angleterre pour édifier une cathédrale à Verulam, où ont été découvertes les reliques de saint Alban. On assiste alors à la naissance de confréries secrètes. Les historiens en trouvent la première trace en 925, année où Edwin, fils adoptif du roi Athelstan, préside à York une assemblée de maçons. Edwin devient Grand Maître de la confrérie des maçons l’année suivante et fonde la première Grande Loge, dont l’autorité va bientôt être reconnue par toutes les loges de bâtisseurs établies en Angleterre.
Le document le plus ancien de l’histoire de la Franc-Maçonnerie est conservé dans les archives de la Grande Loge d’York. Il s’agit de la copie manuscrite en langue anglo-saxonne d’un règlement qui fut adopté par l’assemblée des frères maçons en 926 et qui comprend seize commandements.
En 960, c’est l’archevêque de Cantorbéry qui succède à Edwin au poste de Grand Maître.
Après la terreur de l’an mille, le XIe siècle est marqué par un grand mouvement d’expansion du christianisme, expansion qui aboutira aux croisades. Les corporations italiennes de maçons fondent en 1040 une confrérie destinée à envoyer des architectes et des ouvriers dans les pays où les églises et les monastères manquent encore. La papauté s’intéresse à cette initiative : elle confirme à cette occasion tous les anciens privilèges des maçons et leur reconnaît le privilège de la construction des édifices religieux dans toute la chrétienté. Les rois et les évêques sont désormais tenus de respecter leurs associations.
Partout les bâtisseurs étendent leur influence. En 1090, à Constantinople, se crée l’ordre des Frères d’Orient, émanation des communautés de maçons nés vers le IVe siècle. A l’aube du XIIe siècle, les maçons ont pris conscience de la place qu’ils occupent dans la société. S’ils en doutaient encore, les faveurs que leur accordent les souverains et les gouvernements suffiraient à les convaincre.
Dans toutes les régions où s’établissent des commanderies templières, des francs-métiers (c’est-à-dire des métiers dont les pratiquants jouissent d’un statut indépendant des juridictions seigneuriales et féodales, franc signifiant libre) font également leur apparition. Il ne s’agit pas là d’une simple coïncidence : les templiers ont rapporté de Byzance et des pays arabes le modèle de l’organisation des métiers en corporations franches.
Ainsi, à partir de 1150, on trouve en Ecosse une confrérie de maçons qui tient des assemblées à dates fixes à Kilwinning. Cette Grande Loge de Kilwinning va très vite disputer à la grande loge d’York l’autorité sur toutes les loges anglaises.
En 1275, l’assemblé des maçons de Strasbourg, que préside l’architecte en chef de la cathédrale, Erwin de Steinbach, décide de se transformer à son tour en Grande Loge. Des maîtres maçons viennent d’Angleterre et de Lombardie pour assister à l’assemblée constitutive. Dès l’année suivante, les ouvriers qui travaillent sur le chantier de la cathédrale se groupent en chambres, en ateliers et en loges ; ils adoptent des statuts dont le caractère démocratique est nouveau pour l’époque.
En 1350, les trois loges de Londres, d’York et de Westminster, intente un procès à la couronne d’Angleterre pour obtenir le droit de siéger en permanence en tant que loges maçonniques à caractère spéculatif 1. Un manuscrit royal admet la légitimité de cette revendication. Les copies de ce manuscrit, nommées « Les Anciennes Obligations », inspireront plus tard, au début du XVIIIe siècle, les rédacteurs des Constitutions de la Franc-Maçonnerie.
En 1459, paraissent les Constitutions de Strasbourg, qui nous apprennent que les maîtres et les compagnons réunis à Strasbourg et à Ratibonne ont renouvelé et révisé les anciens usages. Ce texte ne laisse subsister aucun doute sur l’existence en Allemagne depuis au moins deux siècles de loges opératives reconnaissant l’autorité des Grandes Loges. C’est Jobs Dotzinger, maitre d’œuvre de la Cathédrale de Strasbourg, qui a pris l’initiative de convoquer l’assemblée de Ratisbonne. Elle précise les attributions des quatre Grandes Loges de Cologne, de Strasbourg, de Vienne et de Berne.
En 1502, la Grande Loge de Berne, ayant terminé la construction de la cathédrale de cette ville, se transporte à Zurich. Elle a autorité sur toutes les loges de Suisse, mais elle n’hésite pas dans certains cas à consulter la confrérie de Strasbourg.
L’année 1598, voit paraître les premières règles pratiques édictées par les maîtres maçons réunis à Edimbourg, et dont le respect sera désormais obligatoire dans toutes les loges.
Il y est établi que les officiers des loges seront dorénavant élus.
De même sont clairement définie les conditions dans lesquelles devront être admis les apprentis.
Un peu plus tard, d’autres règles sont rédigées, qui précisent que la loge d’Edimbourg est la première loge d’Ecosse, la loge de Kilwinning la seconde, et la loge de Stirling la troisième.
L’un des documents les plus intéressants concernant la Maçonnerie acceptée, c’est-à-dire la Maçonnerie composée de maçons non opératifs, est certainement une minute de la loge d’Edimbourg datée du 8 juin 1600. Elle indique en effet la présence parmi les membres de la loge d’un bourgeois nommé John Boswell, propriétaire terrien.
Vers 1600, dans plusieurs villes, les maçons acceptés se séparent des opératifs pour témoigner envers les anciennes chartes d’une fidélité que les ouvriers bâtisseurs ne conservent pas toujours. Les rose-croix, les alchimistes, les kabbalistes, les hermétistes sont les premiers à entrer dans la Maçonnerie acceptée.
1 Par opposition aux loge à caractère opératif, c’est-à-dire où l’on ne se préoccupe que des affaires concernant le métier de bâtisseur. La Maçonnerie spéculative ou philosophique se soucie, elle, des meilleures voies pour parvenir à une société humaine plus harmonieuse.
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