dimanche 27 novembre 2011

Les Masaïs


Chasseur de lions de l’Afrique Orientale


Il avait pisté le lion pendant trois jours. Ce lion était vieux, couvert de cicatrices et n’avait rien mangé pendant tout ce temps. Le chasseur était maintenant tapi dans l’herbe roussie et observait la hyène qui courait à grandes foulées vers le jeune zèbre qu’il avait tué quelques minutes auparavant avec sa lance. Il l’avait traîné sur la pente, suffisamment pour que la brise de la fin d’après-midi porte l’odeur du zèbre jusqu’au vieux lion qui, savait-il, se chauffait au soleil dans un creux peu profond, environ deux cents mètres plus loin. La sueur dégoulinait dans son cou : le lion viendrait-il pendant qu’il y avait encore quelque chose à dévorer ? Il n’y avait pas de hyènes dans le coin quand il avait tué le petit zèbre et il savait qu’elles pouvaient sentir l’odeur de quelques mètres à plusieurs kilomètres.
Puis il l’entendit : une toux sèche, presque un grognement et il vit l’herbe onduler le long de la pente. Elle ondula à nouveau, cette fois plus près ; puis il aperçut les pointes des oreilles dans l’herbe et la queue toute raide derrière lui au moment où le vieux lion bondissait. Le lion dispersa les hyènes éclaboussées de sang au moment où il retomba sur son arrière-train et il  commença à déchirer le corps du petit zèbre.
Le jeune chasseur devait maintenant choisir son moment. Il attendait sans bouger. Le soleil descendit un peu plus bas. Puis le lion se leva et s’étira et le jeune chasseur projeta sa lance, l’endroit exact qu’il voulait, entre les côtes, juste en dessous de l’épaule. Le lion poussa un terrible rugissement en dégringolant la pente…puis le bruit sourd du corps tombant dans l’herbe s’arrêta.
Quatre jours plus tard, le jeune chasseur perçut les cases de son village à l’horizon ; puis son petit frère vint l ‘aider à porter la peau du lion, et son père et les autres villageois arrivèrent en courant. Il était un homme maintenant.


Il n’y a pas longtemps, chaque jeune Masai, quand il atteignait à peu près l’âge de 15 ans, devait aller tuer un lion. Pendant des siècles, la tradition voulait que ce soit son  initiation à l’état adulte. Les Masais avaient probablement quitté leur patrie d’origine sur le Nil, au début  du 16ème siècle, se dirigeant vers le Sud en longeant la Rift Valley jusqu’à l’Afrique Orientale. Les Masais se réfèrent aux gens qui parlent la langue maa, qui est similaire ) de nombreuses autres langues parlées dans la région du Nil. Elle ressemble beaucoup au bari, langue parlée actuellement au Soudan.
Consolidant leur réputation de guerriers féroces, les Masais chassèrent les Bantous et les Luo qui vivaient déjà là, et reprirent leur vie traditionnelle de pastoralisme, gardant leurs troupeaux dans les immensités du sur du Kenya et du nord de la Tanzanie. La région est riche en ressources naturelles : des plaines couvertes d’herbe, de grands lacs, des montagnes couronnées de neige et des troupeaux de centaines de milliers d’antilopes herbivores – avec leurs prédateurs naturels : des lions, des léopards et des guépards. Parmi les autres animaux herbivores on trouve des hippopotames, des rhinocéros, des buffles et des éléphants. Jusqu’au milieu du vingtième siècle, les indigènes qui vivaient là chassaient tous ces animaux et de nombreuses espèces parmi les milliers existantes, se faisaient des coiffures avec leurs plumes colorées.





Les classes d’âge


La société Masai est organisée en groupes appelés « classes d’âge » A mesure que les gens passent d’une classe d’âge à l’autre, ils modifient leur apparence, et changent même parfois de foyer. Ils avancent ainsi dans la vie, en compagnie des mêmes amis. La seconde classe d’un jeune Masai commence après l’enfance quand il devient un jeune guerrier, entre treize  et seize ans et les filles sont alors en âge de se marier.
D’abord les garçons donnent tout ce qu’ils possèdent : ils ne prendront aucune de leurs vieilles possessions dans leur nouvelle vie d’homme. Les crânes sont rasés et les visages peints avec de la chaux blanche. Ils revêtent de grandes capes noires et des coiffures en plumes d’autruche qui sont faites pour eux par les villageois qui ont aussi préparé une abondance de bière de miel pour la cérémonie.
Après la cérémonie d’initiation, les garçons partent avec leur mère et leurs amies pour se joindre aux guerriers plus âgés dans un manuyatta, une habitation à l’extérieur du village où ils vivront pendant les dix ou quinze années suivantes. Maintenant le jeune guerrier se laisse pousser les cheveux et passe de longues heures à les peigner et les tresser en dreadlocks. Il s’enduit les cheveux, le visage et le corps d’huile et de peinture ocre rouge, porte une grande cape rouge ainsi qu’un bouclier et une lance. Il revêt  des ornements faits par son amie et mène une vie insouciante, jouissant de la vie commune avec ses amis et pratiquant ses aptitudes de pasteur et de guerrier.
Actuellement les jeunes guerriers Masais apprennent les techniques de combat pour se défendre car il est interdit de tuer des lions, à moins qu’un lion, n’attaque les troupeaux, ce qui arrive de temps en temps, les mettant sérieusement en danger.
Tout le monde dans le village admire un guerrier pour sa force et sa bravoure ; son bouclier et sa lance représentent la défense de la liberté sur le drapeau national kenyan. Un guerrier qui a tué un lion à le droit d’arborer une coiffure faite de la crinière du lion : elle le fait paraître plus grand et plus féroce !
Les filles passent la plupart du temps chez elles, à moins qu’elles n’aient des amis parmi les guerriers auxquels elles peuvent devenir très attachées – mais elles ne peuvent pas encore se marier. Elles ne peuvent épouser que des hommes plus âgés  qui ne vivent plus dans le manuyatta. Les parents d’une fille choisiront un de ces hommes plus âgés et négocieront avec lui un prix acceptable pour la mariée. Le paiement est toujours sous forme de bétail et une fois accepté, l’homme peut maintenant combler la famille de cadeaux. Après son mariage, la mariée crée son nouveau foyer dans le village de son mari.
Une cérémonie appelée l’eunoto, marque le passage à la classe d’âge suivante du jeune guerrier, à peu près à l’âge de trente ans. C’est une fête qui dure quatre jours ! la mère de chaque guerrier rase les longues tresses de son fils et lui peint la tête avec la même peinture rouge ocre. Tout le monde se réunit autour  d’une hutte construite spécialement pour l’occasion. A l’intérieur, le laibon, ou guérisseur, tue une vache noire, engraissée à la bière de miel. La vache est saignée au cou et le sang est mélangé avec du lait que boivent tous les guerriers. A la fin de la cérémonie, les anciens bénissent les nouveaux « aînés » en soufflant du lait sur eux.
La viande est ensuite rôtie pour le banquet ; la peau de la vache est découpée en bandes par les mères des nouveaux aînés, chaque mère donnant à son fils un anneau en peau de vache pour marquer l’événement. Il peut maintenant se marier et sa mère peut inviter la nouvelle fiancée sous son toit jusqu’à ce qu’elle  crée son propre foyer. Comme les Masais pratiquent la polygamie, son mari ne vit pas tout le temps dans la même maison. Il rend régulièrement visite aux foyers de ses épouses et enfants.
En tant que nouvel « aîné » il s’initie auprès des anciens, respectés pour leur expérience et leur sagesse et qui forment le conseil du village, prenant les décisions importantes et résolvant les disputes. Les femmes plus âgées du village sont aussi respectées : elles jouent un rôle important pendant les cérémonies et révèlent les problèmes existants aux anciens.
Le père d’un jeune « aîné » est appelé un ancien accompli et il le devient pendant une cérémonie appelée « le passage de la clôture » Il s’installe dans une hutte séparée pendant quatre jours et en sort en portant une nouvelle tenue : une cape en fourrure sur une cape noire en vachette ornée de perles. Il porte aussi un bâton, un chasse-mouches et une gourde remplie de bière de miel !


Comment va ton troupeau aujourd’hui ?


Mais quelle que soit la classe d’âge, la vie des Masais tourne autour du bétail.  Les Masais sont des pasteurs : ils font de l’élevage de bétail qu’ils croient avoir été crée par leur dieu, Enkai, spécialement pour eux, et c’est pourquoi ils ont l’habitude de se battre contre d’autres tribus et leur prennent leur bétail. Etant donné que tout le bétail existant dans le monde leur appartient comment cela pourrait-il être considéré comme un vol ?
On voit aussi des moutons et les inévitables chèvres africaines dans les villages Masais, mais les ovins sont ce qu’ils aiment le plus. La langue maa comporte plus de 30 noms de différentes sortes de bovins, selon la couleur de l’animal et la forme de ses cornes. Les troupeaux de bovins sont un signe de richesse. Il arrive que les gens offrent des vaches en cadeau ou qu’ils les échangent contre quelque chose d’autre, mais ils ne vendent jamais de vaches contre de l’argent. Les vaches sont si importantes que les Masais se saluent et demandent : » comment va ton troupeaux aujourd’hui ? »
Toute la famille s’occupe des vaches : les femmes et les filles les traient deux fois par jour et gardent les veaux dans leurs luttes la nuit pour les protéger des lions affamés. Les hommes et les garçons gardent les troupeaux et chassent le lion et la hyène qui peuvent tuer les jeunes bovins ou les animaux plus faibles. Les vaches ne sont pas mangées, à moins que ce ne soit pour une occasion spéciale, mais elles fournissent aux Masais leur repas principal : une boisson nourrissante de lait de vache mélangée avec du sang de taureau, qu’ils obtiennent en perçant le cou du taureau avec une flèche, mais  en faisant attention de ne pas le tuer.

La migration en masse


Pendant la saison sèche, l’herbe roussit et la nourriture se raréfie pour les vaches. Puis les longues pluies de mars à mai apportent un nouveau tapis d’herbe verte, qui attire beaucoup d’autres animaux, en particulier des troupeaux de gnous qui migrent par millions des plaines de Serengeti au nord de la Tanzanie jusqu’au Kenya. Selon que le dieu Enkai, fait ou non tomber la pluie avec générosité, les Masais vont probablement suivre leurs troupeaux qui migrent peu à peu vers des pâturages verdoyants. Le voyage peut durer plusieurs semaines. Les familles dorment en plein air, les guerriers montant la garde pour protéger leur famille et leurs troupeaux jusqu’à ce qu’ils arrivent dans de nouveaux pâturages où ils construisent un nouveau village vers le mois d’octobre, les troupeaux font demi-tour et repartent vers le Sud. Telle a été la vie des nomades Masais depuis des siècles.
Si le territoire Masai est en grande partie un espace grand ouvert où vous pouvez voir à des kilomètres à la ronde, il a aussi des montagnes très élevées. Le mont Kilimandjaro en Tanzanie au cœur du territoire Masai, culmine à 5895 mètres, c’est le plus haut sommet d’Afrique avec ses deux pics, le Kibo et le Mawenzi, nommés d’après des laibons des années 1800


La légende

Traditionnellement, il y avait trois tribus de laibon : les membres de la première tribu étaient des devins, les autres des guérisseurs et les derniers des faiseurs de pluie. Une légende raconte d’où vient l’origine du mot laibon : un jour, deux guerriers de deux villages ou clans différents rencontrèrent un petit garçon qui était tout seul. Celui qui appartenait au clan il-molelian décida de laisser le garçon tranquille. L’autre, du clan il-aiser ramena le garçon chez lui. Il s’avéra que le garçon avait des pouvoirs spéciaux. Quand il faisait sortir les troupeaux pendant la saison sèche, la pluie tombait, l’herbe poussait et les troupeaux pouvaient paître. Il grandit et devin le premier laibon du territoire Masai et tous les laibons depuis sont venus du clan il-aiser
Les Masais sont un peuple spirituel, vénérant un seul Dieu, le créateur de l’univers, qui n’est ni homme, ni femme mais qui a deux facettes : une facette noire qui est gentille et affectueuse et une facette rouge qui est méchante et cruelle. La légende dit que le tonnerre est le bruit que font les deux facettes d’Enkai en train de se battre : la facette noire veut faire tomber la pluie mais la facette rouge ne le veut pas, amenant la terre à se dessécher et les gens, les plantes et les animaux à mourir. Ce mot « créateur » s’applique au monde inhabité, car les Masais comme la plupart des autres Africains, croient que la Terre a toujours existé.
« au début, disent-ils, il n’y avait qu’un seul homme sur Terre, appelé Kintu. La fille du paradis le vit et en tomba amoureuse et persuada son père de lui permettre de l’épouser. Kintu fut invité au paradis, réussit à passer les tests que Dieu lui imposa et revint sur Terre avec sa femme divine, dont la dot comprenait des animaux domestiques et des plantes utiles. 
 Ils auraient pu être parfaitement heureux, si ce n’est que Kintu avait commis une erreur. En quittant le couple qui venait de se marier Dieu les avait avertis de ne pas revenir sur leur pas. Il avait peur pour eux à cause de la colère de l’in de ses fils, le dieu de la mort, à qui  personne n’avait parlé du mariage et qui, par conséquent n’avait pas assisté à la cérémonie.
En chemin, Kintu remarqua qu’il avait oublié le grain destiné à ses poulets et, malgré les supplications de sa femme, il repartit au paradis. Il se trouva qu’Alas, le dieu de la mort, s’y trouvait. Il suivit Kintu, jusqu’à proximité de chez lui et tua tous ses enfants. Kintu et sa femme, la fille du paradis, supplièrent Dieu en vain. Cependant, pour finir, ce dernier envoya un autre de ses fils pour faire partir le dieu de la mort. Mais ce dernier était plus rapide que son adversaire. Il échappa à tous les pièges qui lui avaient été posés et s’établit comme seigneur de la Terre.


L’ange gardien


Les Masais croient que chaque personne a un ange gardien qui le défend de tous les dangers, et au moment de la mort, l’emmène à l’un des deux endroits suivants : un désert si la personne a mené une vie malfaisante ou une terre riche en bétail si la personne a mené une vie de sagesse. Mais les Masais ne disent jamais que quelqu’un est mort. Si une jeune personne meurt, ils disent  qu’elle est absente. Si une personne âgée meurt, ils disent qu’elle dort. En général, ils n’enterrent pas leurs morts et évitent de creuser la terre car elle est sacrée pour eux : elle est la source de l’herbe pour leurs troupeaux. Au contraire  ils laissent leurs morts dans les plaines herbeuses où ils seront dévorés  par les hyènes et autres charognards.
Si tout le monde est d’accord pour dire que la vie sauvage de l’Afrique orientale devrait être protégée, les vastes étendues qui sont transformées maintenant en réserves pour la faune et la flore ont rendu la vie difficile aux  Masais. Comme ils ne peuvent pas entrer dans les réserves avec leur bétail, ils ne peuvent pas errer aussi librement qu’ils le faisaient autrefois et leur façon de vire traditionnelle est en train de changer. Les Masais sont devenus fermiers ou pêcheurs et les lances, les boucliers et les bijoux sont fabriqués maintenant, non seulement pour la famille, mais aussi pour les vendre aux touristes.

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